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Accueil des demandeur·euse·s d’asile : chronique d’une crise annoncée

Communiqué de presse – 16 november 2021

Le réseau d’accueil est une fois de plus saturé. Depuis près de quatre semaines et ce matin encore, de
nombreuses personnes se voient refuser l’enregistrement de leur demande de protection et nier leur
droit à l’accueil auprès du centre d’arrivée, qui par ailleurs était fermé ces cinq derniers jours. Cette
nouvelle crise est due à la mauvaise gestion du réseau d’accueil par les autorités, ce que des associations
dénoncent depuis plus de dix ans ! Des personnes en détresse paient les conséquences de cette incurie,
leur droit d’asile est bafoué, et elles sont laissées dans le dénuement le plus total. Nos organisations citent
une fois de plus l’État belge à comparaitre pour mettre fin à ces violations de droits.
Un nombre très limité de personnes peut désormais franchir les portes du centre d’arrivée du Petit-Château, en
priorité, celles qui présentent un « profil vulnérable ». Les autres, chaque jour plus nombreuses, sont laissées
à la rue, sans possibilité de faire enregistrer leur demande d’asile, sans recevoir l’accueil auquel elles ont droit
de la part de Fedasil, et sans qu’aucune information ne leur soit donnée. Les bénévoles et les travailleur·euse·s
des associations plaignantes tentent de pallier ces manques, mais se heurtent à la saturation des structures d’accueil (d’urgence ou non), comme le Samusocial, les centres de la Plateforme citoyenne ou le centre PSA de la
Croix-rouge, dont la mission n’est d’ailleurs pas d’accueillir des demandeur·euse·s d’asile.
Les autorités reconnaissent la situation de crise, mais invoquent la mise sous pression du réseau d’accueil du
fait des inondations, des rapatriements d’Afghanistan, de la longueur de la procédure d’asile, des lits réservés
« Covid »…
Cette litanie est cyclique, avec quelques variantes dans les facteurs allégués. Elle ne convainc plus personne.
La seule explication de la saturation quasi permanente du réseau d’accueil est sa mauvaise gestion. Fermeture
de milliers de places et licenciement du personnel qualifié dès que le nombre d’arrivées diminue, réouverture
de places et réengagements en urgence quand les arrivées remontent, travailleur·euse·s de Fedasil épuisé·e·s et
dans l’incapacité de fournir un travail de qualité, bénéficiaires maltraité·e·s par un système qui ne fonctionne
pas… Aucune anticipation, aucune souplesse, aucun respect des personnes et de leurs droits.
Fedasil dit rechercher activement des sites pour ouvrir de nouvelles places d’accueil. Le gouvernement fédéral
annonce la création de 5400 places « tampons ». Mais malgré l’urgence de la situation, aucune solution immédiate de mise à l’abri des personnes concernées n’est envisagée.
Une fois de plus, l’État contrevient au droit belge et européen en matière d’asile et d’accueil. Enregistrer les demandes et fournir une place d’accueil aux demandeur·euse·s d’asile pendant leur procédure est une obligation
qui incombe à l’État. Laisser des personnes à la rue, faute de leur désigner une place d’accueil est considéré
comme un traitement inhumain et dégradant.
Le respect des droits humains n’est pas une option à prendre ou non au gré des circonstances, quand on en a la
possibilité, ou quand on y pense… C’est une obligation et un devoir, quelles que soient les conditions.

Ces dernières années, plusieurs organisations ont dû introduire une série de recours en justice contre des instructions ou des pratiques illégales de l’État belge en matière d’accueil. Ainsi en 2018, suite à l’instauration
de quotas journaliers de personnes pouvant être enregistrées au centre d’arrivée… Puis début 2020, contre
l’exclusion de l’accueil de certaines catégories de demandeur·euse·s de protection en raison de la saturation
du réseau d’accueil. Ou encore quelques mois plus tard, quand après avoir arrêté d’enregistrer les demandes
de protection internationale au centre d’arrivée, les autorités ont mis en place un système de demande de rendez-vous en ligne, qui différait parfois pendant des mois l’octroi d’une place d’accueil.
Elles ont gagné tous ces recours. Mais ce ne sont pas des victoires.
Ce manque de gestion de l’accueil est un jeu cynique et indigne. Son coût humain est inestimable, d’abord pour
les demandeur·euse·s de protection, puis pour les travailleur·euse·s de l’accueil, dont le rôle est mis à mal.
Les conséquences financières de ce défaut de planification sont désastreuses. Et l’impact sur la crédibilité des
autorités belges n’est pas en reste…
Nous avons mis l’État en demeure de respecter le droit d’asile et le droit d’accueil. Sans résultat. Le non-respect de ces droits fondamentaux prévaut toujours et la situation va s’aggraver avec le froid qui s’installe. Nous
n’avons, une fois de plus, d’autre choix que de recourir à la justice.
Chronique d’une crise annoncée, histoire sans fin, éternel retour… Il est plus que temps de travailler à un autre
scénario et à un autre modèle d’accueil.

Signataires:
  • Coordination et Initiatives pour les Réfugiés et les Étrangers (CIRÉ)
  • Vluchtelingenwerk Vlaanderen
  • Samenlevingsopbouw / SAAMO
  • NANSEN vzw
  • Avocats.be – Ordre des Barreaux francophones et germanophones (OBFG)
  • M »édecins sans frontières (MSF) Belgique / Artsen zonder grenzen (AZG) België
  • Medecins du monde / Dokters van de Wereld
  • Ligue des Droits humains / Liga voor Mensenrechten
  • La Ligue des Droits humains (LDH)
  • Association pour le droit des étrangers (ADDE)
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